SAINT-ESTEPHE, SON HISTOIRE, SON PATRIMOINE, SON TERROIR, SON VIGNOBLE
L’origine du nom SAINT-ESTEPHE est vraisemblablement liée à une déformation de SAINT-ETIENNE, transformé en ESTEPHE dans le parler local.
Bien que la vigne soit apparue avec les romains, sous l’impulsion des gaulois et des médullis, peuplade autochtone d’origine celte, comme pour beaucoup de terroirs, on y note l’apparition de domaines viticoles déjà constitués à partir du XIIIe Siècle.
_ Balade à SAINT-ESTEPHE
Le Médoc est au nord-ouest de Bordeaux vers l’océan. Un jardin au bord de l’eau. En traversant ce Médoc pour aller à Saint-Estèphe, vous allez admirer des rangs de vignes alignés au cordeau, s’épanouissant sur un sol graveleux qui impose à la vigne d’aller chercher très profondément sa nourriture, et ponctués de magnifiques châteaux, pour beaucoup du 19° siècle. Vous venez admirer à Saint-Estèphe, ce nom magique de réputation mondiale qui fait rêver tous les passionnés du vin. Pour arriver à Saint-Estèphe, prenez la N° 215, puis après la rocade prenez la D2 en direction de Blanquefort. Après Pauillac, direction Saint-Estèphe, après d’être passé devant le château Cos D’Estournel direction Leyssac et Saint-Estèphe.
Les chemins serpentent les vignes et longent quelquefois un petit bois. On peut admirer des bâtiments, les Châteaux et leurs grilles, et des points de vue permettent de vérifier que la vigne est ici en Médoc, implantée sur les collines ou croupes de graves. Il y a aussi un jardin à la française dans une propriété et on peut apercevoir des petits jardins potagers en contrebas du village. Au milieu des vignes se dresse une magnifique chapelle en haut de la colline. Et puis… des rosiers, beaucoup de rosiers. Cette présence en bout de rang est très fréquente dans le vignoble. Outre l’aspect esthétique qui confère un air de jardin bien entretenu à la vigne, ceux-ci servaient au siècle dernier à prévenir l’attaque du mildiou. Les parasites de la vigne étant à peu près les mêmes que ceux de l’arbuste, il suffisait d’observer l’état du rosier, en bout de rang, pour prévenir une attaque de mildiou ou d’oïdium, ou la présence intempestive de puceron.
A l’ombre de cette sentinelle de pierres blondes on profite du point de vue sur le village de SAINT ESTEPHE, l’estuaire et les vignes. En se promenant à SAINT-ESTEPHE, vous longerez des chais, des parcs, des dépendances, du XVIIe ou XVIIIe siècle, un beau décor de contes et de légendes. Tous ont une histoire à vous raconter… Les différents villages de SAINT-ESTEPHE s’étirent à l’intérieur d’un demi-cercle, dont le centre est à peu près le hameau de Meyney. Ce lieu est le berceau du vignoble stéphanois. Impossible à dater avec précision, la viticulture y fut probablement implantée dès l’époque gallo-romaine. La maison de « Coley » dépendait de la seigneurie de Calon, qui fut l’une des plus vastes du Médoc jusqu’à Louis XIII. Un siècle avant la fureur de planter, la vigne y fructifiait de façon plus large que dans les autres paroisses et ceci grâce à l’ordre religieux des Feuillants qui s’y était établi.
A partir de Meyney, et dans le sens des aiguilles d’une montre, le hameau de Marbuzet dont à l’intersection de la rue du 8 mai 1945 et du chemin de la fontaine, vous trouverez la fontaine qui est une des plus belles de la région. Ensuite Cos, aux confins de la petite vallée du Breuil. Continuant la ronde, il y a Ladouys, Blanquet, l’Hôpital de Mignot, le Cendrayre, Leyssac, village rival du « bourg » où se trouvait autrefois la gare ferrovivaire aujourd’hui désaffectée. Il y a Brame-Hame un joli nom gascon qui veut dire « pleure-la-faim », plus loin, troupian, Les Pradines, Lavillotte, Laujac, Pez, ou trouverez une fontaine l’Héréteyre, Aillan, sur la rue de la fontaine : une de chaque côté de la route, le Paluda, Saint-Corbian, se trouve une autre fontaine, situé en bas de la rue de Pigot, et le Boscq.
Le village est composé essentiellement de maisons en pierre. Sur la place se trouve la sublime église baroque rebâtie au XVIIIe. Traditionaliste, la commune de SAINT ESTEPHE offre au visiteur un aspect qui globalement appartient au passé. L’habitat se répartit en vingt-six villages ou hameaux. Le bourg proprement dit contient une cinquante de maisons, pour la plupart de style XIXe siècle et l’église paroissiale avec sa petite place fermée. Autour d’elle se dessinent cinq quartiers : La Croix, Picard, Canteloup, Fontaugé et le Port. Le port à ce jour n’a plus beaucoup d’activité. On y trouve quelques maisons ainsi que le bar restaurant et l’aire de repos et pique-nique qui permet à la belle saison, soit de prendre un pot soit déjeuner en regardant passer les bateaux. Autrefois cet endroit s’appelait la Chapelle. Les bateaux et les pêcheurs y faisaient dire leur messe et y fixaient leur ex-voto. Pour donner un genre « new-look » au site, il s’appelle aujourd’hui les Allées Marines. C’est un lieu paisible. Une fois par an, la traditionnelle « foire à la chapelle » cette tradition remonte au moyen âge. On y trouve de tout, on peut acheter un bleu de travail, un ticket de manège, des sachets de berlingots, des voitures, des vins à déguster, une restauration sur place, de l’ail et des oignons, traditionnellement, elle s’appelle la foire de L’ail et de l’Oignon, des produits régionaux, des animations… Elle a lieu autour du dimanche de la Nativité de la Vierge début septembre. Au port de la Chapelle, vous aboutissez ainsi derrière le hameau du port, à la hauteur d’un ancien moulin qui rappelle l’importance de l’activité de cette région avant que la vigne n’ait pris son essor.
En bouclant le circuit, si on retourne au port, sur la belle route du bord de l’eau construite en 1968 qui fait communiquer directement SAINT-ESTEPHE à PAUILLAC.
Sur ce bord de la rivière, le fleuve y est impassible et vous permet d’apprécier des paysages sans cesse renouvelés. Cet estuaire qui est le régulateur thermique qui modère les rigueurs du climat, empêche le gel des terres. Les paysages de l’estuaire, aujourd’hui encore sont changeants et contrastés. Le ciel n’est jamais gris très longtemps. La brume matinale peut s’évaporer en quelques instants. L’après midi, c’est chaud et ensoleillé. L’influence des vents océaniques, les flux et reflux des marées ainsi que l’alternance des forêts et des marais créent une illusion de mouvement permanent. Ce fleuve marque ainsi fortement l’esprit des lieux. Les gens d’ici vivent au rythme du fleuve. Il leur inspire un respect profond mais aussi une crainte justifiée.
On y trouve tout le long de la Gironde, l’élégant Carrelet, juché sur de longs pieux en acacia, le ponton s’avance sur le fleuve, équipé d’un filet carré et surmonté d’une cabane en bois, dont certains sont personnalisées. C’est un vrai patrimoine local à fleur d’eau, on en trouve 550 sur tout l’estuaire. La façade Est de Saint-Estèphe, qui longe cet estuaire possède la plus grande densité de cabanes de cette rive gauche.
L’activité de pêche est encore importante dans l’estuaire. Le bord de la route est assez large pour accueillir le promeneur, sans avoir à marcher sur l’asphalte.
Elle permet une vision du vignoble, on traverse les prairies de palus et on observe la naissance des croupes graveleuses avec leurs sommets couronnés de châteaux clochetonnés. On y voit les vestiges « les pylônes » à tourterelles, petites tours en bois aux plates-formes dissimulées par des brandes de genêt, qui servaient au mois de mai pour guetter le retour vers le nord des ces oiseaux migrateurs. La chasse à la tourterelle était aussi sacrée que ancestrale.
Les produits du terroir que seul le Médoc peut vous offrir ; Sans hésitation l’agneau, l’entrecôte sur les sarments, les cèpes, l’anguille, la lamproie à la bordelaise…. L’art culinaire au rendez-vous….
_ LES FONTAINES
_Les 4 fontaines ont une armature en pierre et dans chacune d’entre elles, on peut encore voir une source qui coule et qui les alimente. Les fontaines de Aillan ont été bâties pour servir de lavoirs. Il est à noter qu’un lavoir se trouve également, chemin de Bocq, avec des murs en pierre et des ouvertures en forme d’ogive rappelant quelque peu l’architecture gothique. Ce lavoir est aussi alimenté, faiblement par une source. Il s’agirait à priori de la source du plateau de Houissant, qui coule encore jusqu’à la majeure partie des puits de Leyssac.
Une autre fontaine se trouvait encore, il y a quelques années, en contrebas devant le mur du Château Phélan Ségur. Elle aussi servait jadis de lavoir pour les gens du Bourg. Ce lavoir comme ses alentours étaient pavés de pierres. Cette fontaine a été rachetée par le Château Phélan Ségur et n’est plus aujourd’hui qu’un souvenir pour les stéphanois.
_ LA CHAPELLE DE LEYSSAC
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_ LE CIMETIERE
Mémoire de Pierre, article de Madame Michele Morlat Tardat pour le Journal du Médoc, 6 novembre 1998. Le monument aux morts et l’art.
« On se trouve en face d’œuvres qui ne sont pas issues des sources les plus profondes du pays, mais inspirées par un art officiel patronné par des mandarins et leurs élèves. » C’est ainsi que Gaston Leroux (1854-1942) qui a signé trois monuments en Médoc (Saint-Estèphe, Saint-Laurent et Pauillac) fut le sculpteur officiel de la ville de Bordeaux, professeur de statuaires et directeur de l’école des beaux-arts.
Les épigraphes pour mémoire. Sur quelques-uns figure la date de l’inauguration : 1926 pour Saint-Estèphe. Vient enfin la liste des morts, la plupart du temps par ordre alphabétique (les grades disparaissaient, tous sont au tableau d’honneur) parfois par année. Les morts des suites de guerre y figurent aussi (4). Variation médocaines sur un thème : La patrie : le monument chrétien (infirmière devant la croix)
Le financement : Le 25 novembre 1919, l’état vote le principe d’une subvention modulable selon les dépenses effectuées par les communes. Le 30 juillet 1920, les modalités sont données : les sommes allouées sont proportionnelles au pourcentage des morts nés ou résidant dans la commune, par rapport au recensement de 1911 et inversement proportionnelles à la valeur du centime communal démographique de l’année de l’attribution. Des barèmes établis, il ressort que le maximum alloué représentera 25% de la dépense. Si l’on trouve trace dans les délibérations des conseils municipaux des demandes de subvention comme à Saint-Estèphe (septembre et novembre 1920) on ne sait pas si elles ont abouti. De nombreuses municipalités votent une subvention. A Saint-Estèphe, 6 000 francs. De plus, toutes les municipalités lancent une souscription publique à leur initiative ou à celle de comités mixtes comprenant élus et curés, instituteur, sociétés de bienfaisance, à Saint-Estèphe, propriétaires viticoles, le député Mandel, les veuves. A Saint-Estèphe, où le village a été quadrillé en différents quartiers, la souscription rapporte 18 150,75 francs. Certains notables ont donné 200 francs, une veuve 5 francs…
Structure et ornementation. D’abord, le choix fut fait en fonction des possibilités de la commune, mais aussi de la confiance accordée à l’architecte, l’artiste ou l’artisan et enfin de la « mode ». En Médoc, tous auront une ligne verticale. Le témoignage, le signal doit être visible de loin. C’est avec des formes antiques, l’obélisque, la pyramide, la stèle, le fût de colonne, « bases de la grammaire des styles néoclassique », qu’on célèbre le culte des héros. Surmontés d’un pyramidon, d’une croix, d’une croix de guerre, d’un coq ou d’une statue, ils dévident la litanie artistique de la mort monumentale. Les matériaux seront parfois issus de la démolition, pour le socle de celui de Saint-Estèphe c’est le granit et le bronze. Les attributs, souvent allégoriques, représenteront en sculpture ronde, bosse ou bas-relief, en statues, des personnages féminins symboliques ou laïques, infirmière, victoire, Patrie. Surtout le poilu, de garde, au repos, au combat, blessé, mourant, mort…Il passe des bras des anges blancs, les infirmières, à ceux de ces statues anges et femmes à la fois. Le voilà petit, léger. L’allégorie féminine est un langage connu pour les artistes. Annette Becker, historienne, va plus loin : « Elle avait aussi l’avantage de laisser la femme à une place, celle du symbole, où elle ne risquait pas de revendiquer la moitié du monde… »
A ajouter le coq, devenu gaulois par un glissement linguistique – galus – galia -, eul ou terrassant l’aigle allemand. La croix qui marque certains monuments fut un sujet de polémique. La croix de guerre (alliance de la foi et la bravoure) permet de déjouer la loi du 9 décembre 1905 (séparation de l’église et de l’Etat), qui interdit « d’élever ou d’apposer aucun signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou en quel qu’emplacement que ce soit, à l’exception des édifices servant au culte, des sépultures dans les cimetières ». A cela s’ajoute tout le « bric-à-brac patriotique » que l’on peut commander sur catalogues, croix, palmes, médaillons de poilu, branches d’olivier, de chêne, guirlandes, couronnes, épées sculptées dans la pierre ou le métal. Le réalisme de la mort difficile à assumer, s’en trouve d’autant repoussé.
_ Inauguration du monument aux morts de Saint-Estèphe.
Délibération du conseil municipal du 15 janvier 1922 « Dimanche 12 février 1922, messe commémorative à laquelle toute la population est invitée. Devant l’église, formation du cortège et départ dans l’ordre suivant : enfants des écoles, pupilles et orphelins, fanfare de Lesparre, familles des morts, croix rouge, mutilés et blessés, société « Les camarades de combat », société « Les vétérans », militaires en permission, municipalité, union sportive, société « Les Cabernets », clergé, population. Au cimetière ; bénédiction du monument. Appel des soldats morts. Inauguration. Le conseil municipal compte sur le patriotisme de la population. » On ne parle pas de banquet, ils eurent lieu pourtant, à Vertheuil par exemple. « Après un brin d’émotion passagère, la fête ». les historiens diront que le « Mort pour la France » représenté après chaque nom correspond à l’Amen du culte chrétien et que la minute de silence est « la forme laïcisée de la prière… ».
_ Le Mausolée du cimetière de Saint-Estèphe
Près du cénotaphe en marbre blanc élevé aux « enfants » de la commune dans le cimetière, se trouve, comme en négatif, un sombre mausolée de ciment gris qui renferme 187 caissettes de soldats mort pour la France en 14-18.
Ils étaient Malgaches, Indochinois, Africains et dormant au cimetière du Lazaret lorsqu’on les a dérangés avant la Seconde guerre mondiale pour réaménager les terrains de la Shell. Dans l’au-delà, pas d’apartheid, le responsable du cimetière entretient avec respect leur sépulture.
Découvrir Saint-Estèphe, c’est découvrir le patrimoine historique, géologique, archéologique, quel beau mariage. Sans oublier, l’extraordinaire diversité de nos crus, qui raconte une histoire, un terroir, un homme et son talent que sont nos viticulteurs Stéphanois, dans ce beau village.
_ VIVRE A SAINT ESTEPHE
C’est un lieu paisible entre l’estuaire, l’océan et la foret